Les travaux de la première tranche du projet de réhabilitation de la Casbah de Boulaâouane, site historique de la province d’El Jadida, pour un montant de 11 millions de dirhams, ont été lancés, dans le cadre l’exécution des projets intégrés de restauration, d’aménagement des monuments historiques et sites archéologiques du Royaume.
Lancés par le ministre de la Culture et de la Communication, Mohammed Laârej, les travaux portent sur la remise en état des murailles, des couloirs de sécurité ainsi qu’à la restauration de la mosquée et ce, conformément aux règles de l’art en matière de réhabilitation des casbahs et monuments historiques, indique un communiqué du ministère.
M. Mohammed Laârej, qui a également donné le coup d’envoi pour la réalisation d’études de diagnostic géotechnique relatives du site, a souligné que ce projet compte la mise en place, depuis le centre urbain de la ville d’El Jadida, d’un circuit touristique balisé vers la Casbah afin de faciliter l’accès au site.
À cette occasion, M. Mohammed Laârej a souligné que ce projet compte la mise en place, depuis le centre urbain de la ville d’El Jadida, d’un circuit touristique balisé vers la Casbah afin de faciliter l’accès au site, ajoutant que la mise à niveau du cadre environnant est en perspective et vise à attirer les projets d’investissements touristiques, environnementaux et scientifiques à même de participer au développement durable de la région et faire de la Casbah un musée à ciel ouvert et un pôle d’attraction pour les visiteurs, nationaux et étrangers, poursuit le communiqué.
Le ministre a aussi mis l’accent sur la nécessité de développer la recherche scientifique sur le site, plus particulièrement les fouilles archéologiques destinées à amplifier la dignité historique, la beauté et l’authenticité de ce fleuron architectural qui recèle une part importante de la mémoire nationale.
Pour rappel, ces projets de réhabilitation participent de la stratégie du département de la Culture, visant la préservation, la sauvegarde et la valorisation du patrimoine culturel dans l’ensemble des régions du Maroc afin de contribuer activement au développement économique et social global.
Il est à noter qu’en 1994, feu Driss Basri, ex-ministre de l’intérieur, avait annoncé qu’on était prêt à restaurer la Casbah de Boulaâouane à condition qu’elle fasse partie de la province de Settat. Mais, comme les Doukkalis ne voulaient guère qu’on les prive de ce legs précieux, le projet de restauration est tombé à l’eau.
Il est à noter aussi qu’un plan d’action pour la sauvegarde de la Casbah a été établi par les services provinciaux, il ya quelques années. Mais rien n’a été entrepris. N’y a-t-il pas une solution urgente à trouver pour éviter que la Casbah de Boulaâouane ne s’effondre à jamais ? Espérons que cette fois-ci le Ministère de la Culture, qui a eu le bon goût de lancer les travaux de la première tranche du projet de réhabilitation de la Casbah de Boulaâouane et que le Centre des Monuments Nationaux, saura redonner à ce monument unique tout son lustre d’antan. Car si rien n’est fait, la Casbah risque de se transformer en une grande carrière de pierres… et un souvenir ancien.
Bref rappel historique de la Casbah
Située, sur la rive gauche de l’oued Oum-Rbia, au point le plus étroit d’une boucle de l’Oum-Rbia, la Casbah de Boulaâouane surplombe toute la région sur les deux rives du fleuve. Ce gîte impérial est accessible par la R.N.1, puis R.R. 316, et enfin la RR 314. La forteresse surplombe toute la région et ses tribus environnantes.
À mi-chemin entre Settat et El Jadida, la Casbah de Boulaâouane, qui fait partie des soixante-seize forteresses construites par Moulay Ismaïl, est un château fort qui se trouve au sommet du point le plus culminant d’un mont rocheux au bord d’un magnifique méandre du fleuve Oum-Rbia. La Casbah comportait une demeure royale, des maisons de notables, une mosquée et des entrepôts.
L’accès à la kasbah se fait par une porte monumentale. Sur sa façade, orienté vers le Sud-Sud-ouest, une porte monumentale, caractérisée par trois arcs dans un encadrement rectangulaire, porte au fronton une inscription très lisible et fort bien conservée, dont voici la traduction : « Casbah édifiée sous le règne du victorieux, puissant, conquérant avéré, notre seigneur Ismaïl, le champion de la guerre sainte pour la cause du Maitre du monde, que Dieu lui donne son aide et la victoire, et sous la surveillance de son serviteur, assisté de Dieu, Abou Othman Ilyas Saïd Ben El Khayat, que Dieu l’assiste, à la date de l’hégire 1122 correspondant à l’année 1710 du calendrier Grégorien». Après avoir franchi cette porte et le porche inférieur, on aperçoit de chaque côté, des réduits pour les gardes et à droite les ruines de la demeure du Sultan Moulay Ismaïl, vaste maison carrée, à grandes et élégantes colonnades et une cour intérieure desservant quatre pièces, Ensuite, Sur la droite, passés l’entrée principale et le vestibule, se trouve ce qui fut la maison du sultan, de configuration classique, avec sa cour intérieure et ses quatre grandes salles de chaque côté. Là aussi, on voit des vestiges de mosaïques multicolores et de belles arabesques sur plâtre. Sur le sol, gisent des morceaux de colonnes en marbre. Ces colonnes proviendraient du Palais Saâdien El Badii de Marrakech.
Les annexes et un petit hammam précèdent la maison que devait occuper le seigneur des lieux. Accolée et communiquant par une seule porte avec la cour intérieur de cette maison, une grande tour, d’environ 10 à 12 mètres, fissurée de haut en bas, domine la kasbah et ses environs. L’escalier intérieur, délabré et effondré en partie, ne permet plus malheureusement d’atteindre le sommet de cette tour, d’où l’on devait jouir d’une vue splendide. En face de la maison, le long des remparts, il ya six grands magasins souterrains (silos). Dans l’angle opposé de l’enceinte, s’élève une mosquée dont la toiture effondrée a malheureusement été refaite avec une dalle de béton qui ne rappelle en rien le décor ni les matériaux originels et dont les voûtes sont supportées par 18 colonnes. Dans l’une des cours de cette mosquée, on voit la petite Koubba et le tombeau de Sidi El Mansar. De nos jours, la Koubba et le tombeau de Sidi El Mansar est le lieu très fréquenté des épouses stériles qui viennent en pèlerinage demander au santon les joies de la maternité. Au Nord de la Casbah, une porte, qui n’existait pas à l’origine, a été ouverte en 1949 par un colon qui exploitait des terres aux alentours.
Selon une hypothèse séduisante mais non vérifiée, le nom de Boulaâouane tirerait son origine de « bilaouane », épithète berbère signifiant « boyaux ». Abou Al Hassan Al Ouazzane dit Léon l’Africain, dans son œuvre intitulée « Description de l’Afrique », parle de la région de Boulaâouane au XVe siècle comme étant une zone marécageuse à vocation agricole, riche en forêts, et si abondante en poissons que les hommes pouvaient les pêcher à l’aide de leurs vêtements! La région était en quelque sorte, comme aujourd’hui encore avec la Chaouia, le grenier du Maroc. Mieux: le site de la Casbah qui bénéficie d’un microclimat exceptionnel, à la fois continental et océanique, forme un ensemble étonnant dans la continuité de la plaine des Doukkala avec celle de la Chaouia. Et selon M. Michaux-Bellaire, «la Casbah de Boulaâouane se distingue des autres monuments de ce genre par son dispositif de défense : l’emplacement choisi pour son édification, la présence d’un donjon, d’une poterne, d’une barbacane, d’une rampe couverte accédant au fleuve et de tours de flanquement judicieusement disposées, paraît indiquer que le plan de cette forteresse a été dressé par une personne possédant quelques notions d’architecture militaire».
Repères
-À environ 75km d’El Jadida, 60 km de Settat et 125 km de Casablanca, la majestueuse Casbah de Boulaâouane, qui fait partie de la circonscription de Khémis Mettouh, semble surveiller la plaine de l’Oum-Rbia depuis trois siècles.
-En 1514, à l’époque Wattasside, la région de Boulaâouane, située à la lisière des régions des Doukkala et de la Chaouia, fut le lieu de violents combats entre Marocains et Portugais. Il en découla un climat d’insécurité qui fit fuir les habitants et agriculteurs de la région. Et vers 1710, Moulay Ismaïl, en grand stratège politique, décida, à la fin de son règne, d’édifier une imposante forteresse capable de mettre fin à ce climat de terreur qui perdurait depuis deux siècles.
-En 1745, Moulay Abdallah, fils de Moulay Ismaïl, demeura une année dans la région de Doukkala, au sein de la Casbah de Boulaâouane.
-Cette région est très réputée, pour ses champs de vignes (raisins doukkalis).
– Une forêt qui sent l’eucalyptus et le pin, une végétation sauvage qui dégage, entre autres parfums, l’arôme du thym, embaument et purifient l’air ambiant dans la région.
-Le site est classé monument historique, par dahir du 11 Mars 1924 (cf. B.O n°955 d’avril 1924).