Une rencontre à eu lieu à El-Jadida  le vendredi 06 décembre  avec la journaliste et critique littéraire Kenza Sefrioui , pour une discussion autour de son ouvrage “La revue Souffles – 1966/1973 – Espoirs de révolution culturelle au Maroc“.

Crée à Rabat en mars 1966 par un petit groupe de jeunes poètes d’expression française, Souffles à été, tout au long de ses sept années d’existence, une tribune singulière dans le paysage de la presse marocaine, en évoluant du laboratoire d’écriture, où les lecteurs découvrirent notamment Tahar Ben Jelloun ou Mohammed Khaïr- Eddine, à l’engagement culturel et politique.

Avec son projet de restructuration de la culture nationale, elle a porté un véritable mouvement littéraire et intellectuel, avant de devenir la tribune du mouvement marxiste-léniniste. Disparue en 1972, après l’arrestation d’Abdellatif Laâbi et d’Abraham Serfati, son histoire, retracée au travers des textes et des témoignages de ses contributeurs, montre que sa vision moderniste et progressiste invitait à des questionnements toujours d’actualité.

Souffles a été, sinon la première revue littéraire et culturelle du Maroc indépendant, celle qui a eu le plus d’importance. Elle a fait date dans l’histoire littéraire, étant la vitrine de la nouvelle littérature marocaine, et en rassemblant toute une génération d’écrivains et d’intellectuels, à l’époque très jeunes, et dont beaucoup ont eu par la suite un brillant parcours : Abdellatif Laâbi, Mostafa Nissabouri, Mohammed Khaïr-Eddine, Tahar Ben Jelloun, Abdelkebir Khatibi, Ahmed Bouanani, Mohammed Berrada, Driss El Khoury, etc. Aucune revue n’a par la suite eu cette puissance d’attraction des énergies créatrices. Souffles a également été la première à tenter de dépasser le clivage entre écrivains d’expression arabe et française, en publiant des traductions et en réalisant trois numéros bilingues. Elle a par ailleurs travaillé en lien étroit avec les artistes peintres de l’Ecole des Beaux-Arts de Casablanca, avec les cinéastes et les hommes de théâtre, artistes qui tous avaient en commun de refuser toute forme d’académisme et d’assumer des recherches expérimentales dans leurs domaines respectifs.

« Cette revue, écrit Abdellatif Laâbi dans la préface, qui aurait pu vivre la vie tranquille d’un cénacle de poètes et d’artistes… a réussi, elle, en une série d’avancées de la conscience, à opérer deux ruptures essentielles : l’une dans le champ culturel et esthétique, l’autre dans le champ politique… »

Kenza Sefrioui, née à Paris en 1979, est journaliste et critique littéraire. De sa thèse de doctorat en littérature comparée consacrée à Souffles, elle donne aujourd’hui une étude rigoureuse en même temps qu’un récit passionnant qui plonge le lecteur au cœur de la revue et de ses engagements «ardents».