La province d’El Jadida devrait normalement jouer dans la cour des grands

Écrit par : Ahmed Chahid

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Depuis un certain temps, trop de projecteurs se sont braqués sur la Province d’El Jadida en la qualifiant parfois de futur premier pôle économique du pays. Les projections d’avenir telles qu’elles se présentent jusqu’à nos jours tendent vers ce même sens, surtout lorsque cette Province s’est greffée à la géante région Casa-Settat même au risque de perdre son nom en cours de route.

Toutefois, pour l’observateur averti, ce n'est pas surprenant que la province d'El Jadida puisse reconquérir sa position de plate forme économique de premier choix sur l'échiquier National. D'ailleurs, cet état de fait ne peut être considéré que comme un retour à la normale et une réconciliation de cette province avec son propre passé.

L'histoire de cette région n'arrête pas de nous rappeler que dès le début du 19 ème siècle, cette terre constituait un grenier des plus importants en produits liés à l’agriculture et une place privilégiée pour le négoce International au point où nombre de représentations consulaires s'y étaient installées pour défendre les intérêts économiques de leurs ressortissants.

Toutefois, ce qui est primordial aujourd'hui, ce n'est plus le fait de s'interroger sur le devenir de la Province d'El Jadida, mais sur le comment accompagner et adhérer à cette nouvelle dynamique qui se traduit sur le terrain par un gigantesque chantier ouvert et dont la cadence bousculera certainement les habitudes de certains retardataires, jusqu'ici, peu enclin à suivre le mouvement de cette lame de fond bénéfique pour tous.

En s'ouvrant sur une métropole comme Casablanca, la province d’El Jadida devrait normalement jouer dans la cour des grands. Et dans de telles circonstances, une prise de conscience collective s'impose, à commencer par les mentalités, que ce soit celles des responsables politiques et administratifs que celles des citoyens, qui doivent savoir comment tirer les choses vers le haut et non pas succomber aux tentations répréhensibles du chacun pour soi. Les  premiers et en référence aux prérogatives et devoirs qui leur sont impartis, doivent être dans l’obligation de suivre au pas cette mutation rapide qui n’est pas facile à gérer, en donnant beaucoup d’eux même afin d’endiguer en toute lucidité  tous ces phénomènes invasifs et indésirables que ne manque pas de charrier toute ruée vers l’or.  Quant aux seconds, quoique leurs réactions parfois intempestives sont légitimes et méritent qu’on leur accorde réflexions, ils sont tenus de faire preuve de plus clairvoyance et d’un peu plus de sens de civisme, parce que tout simplement, l’heure d’aujourd’hui appelle à la cohésion générale et au sens du devoir accompli.

Vu d’en haut, ce panorama paraît des plus flatteurs et annonciateur d’un nouveau cycle de la vie économique de cette entité territoriale qui a longuement attendu qu’on lui reconnaisse ses vertus  et sa fertilité, que ce soit au niveau de ses richesses naturelles qu’humaines.

Seulement, là où le bât blesse, là où l’euphorie perd toute sa saveur, là où l’on risque de se trouver en porte-à-faux avec tout ce qui est cité plus haut… c’est en jetant un coup d’œil du côté de la ville d’El Jadida, cette éternelle capitale de Doukkala dont l’état actuel nous donne l’amère impression de cet innocent qu’on est entrain de pousser sadiquement vers l’autel des sacrifices.

Serait-ce là, la caution que doit payer la Province pour postuler à un siège parmi les grands ou tout simplement un rhume passager provoqué par un manque d’attention de la part des gérants, anciens et nouveaux qui se sont relayés aux commandes de cette ville ?

Une chose est sûre, l’état actuel est plus que regrettable. Mais il faut avoir le courage intellectuel de dire que depuis un certain temps, El Jadida-ville fait penser beaucoup plus à un brouillon des plus chiffonnés qu’on a tendance à cacher par peur des représailles du maître. Ce qui est encore plus inquiétant c’est ce silence lourd,  oppressant et incompréhensible qui fait échos à toutes ces alertes fusant d’un peu partout et qui dénoncent l’état de délabrement de plus en plus critique de la ville.

Une urbanisation effrénée et chaotique, un projet de réhabilitation dont certains qualifient de douteux et qui est de surcroît à l’arrêt depuis plusieurs mois, sans que les citoyens en comprennent les occultes raisons. Tout ce qu’on peut retenir du grand tapage qui a précédé le lancement des travaux de ce Relooking présumé qui vaut la bagatelle de quelques milliards, se résume de nos jours au leurre représenté par de multiples panneaux d’affichage qui vantent le coté esthétique des réalisations futures liées à ce projet.

Oui, El Jadida n’est plus à l’aise dans sa propre peau, puisque même ses repères les plus frappants ont tendance à se diluer inexorablement dans l’anonymat sans que cela puisse inquiéter les gérants locaux. Aujourd’hui, on serait tente de la qualifier de miroir brisé dont les fragments qui n’ont plus le pouvoir de refléter les grandeurs de son passé peuvent désagréablement causer  de graves et profondes blessures.

Espérons quand même que les premiers signaux, quoique encore embryonnaires, que nous lance le nouveau gouverneur de la Province nous invitent à ne pas nous désengager de notre optimisme qui s’est usé jusqu’aux cordes, suite aux séries de déceptions que les citoyens d’El Jadida supportent toujours avec grande peine et énormément de patience. Seulement, il serait terriblement déloyal de focaliser toutes les aspirations ou réprimandes sur un seul pan du mur en se contentant de contempler ce qui va en sortir. Il y a lieu de fusionner les efforts à tous les niveaux de responsabilités pour rendre à El Jadida ses insignes d’honneur et la libérer du spectre de cette honte qu’on ne cesse de lui jeter à la figure.

 

El Jadida ne supportera jamais d’être cataloguée comme ville dortoir. Elle n’admettra jamais qu’on en fasse une ville dépotoir.