Par : Ahmed Chahid

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lors d’une longue interview que nous a accordée M’hamed Elaadi, le 03 Mai 2011, alors qu’il avait la tête dans un trou noir, nous avons senti son cœur s'embraser de voix (-es) de l’exil qui résonnaient avec force et émotion. Cet exil est-il vécu par M’hamed Elaadi comme une perte ou comme occasion d’élargir son horizon de vie ?

 

« Vous savez, je ne suis pas un défaitiste. Un vrai artiste ne peut jamais être défaitiste, même si tout ce que je viens de vous raconter a des incidences négatives sur ma vie familiale et professionnelle. 
Ma décision de divorcer avec El Jadida, cette ville que j’aime, a été prise un soir où je me trouvais devant le théâtre municipal. En contemplant longuement ce monument sans égal, j’ai vu défiler devant moi, comme dans un film, toutes ces œuvres que j’ai réalisées, que ce soit à El Jadida, Sidi Bouzid, Nador, Aix en Provence, Sète, Doubaï ( Borj El Arab), Bahreïn ( conservatoire national)….et par association d’idée, j’ai compris que si El Jadida ne peut estimer à sa juste valeur, l’importance de ce géant qui souffre dans la solitude et la décrépitude, comment peut-elle disposer de la moindre fibre capable de vibrer au son de l’art et des artistes. Que peut donc représenter l’artiste sculpteur Elaadi, pour combattre l’indigence artistique qui sévit dans la ville, au moment même où le théâtre municipal, ce dernier témoin de l’âge d’or de l’animation culturelle, se meurt dans le silence et l’indifférence quasi-totale ? 
Je ne sais pas combien de temps aurait pu durer cette méditation, si ce n’est cet appel téléphonique qui m’a réintroduit dans le monde de  l’amère réalité ; C’état le professeur Abdellatif Benbine, qui me disait être accompagné de nombre d’autres académiciens et qui m’attendaient devant mon atelier. Un grand honneur pour moi, une reconnaissance qui vient d’ailleurs, un nouveau souffle de confiance et surtout l’ultime présage qui balaya d’un trait mes faibles sursauts d’hésitation pour me décider à quitter définitivement El Jadida afin de me fixer en rase campagne dans la commune de Boulaouane, là où j’ai installé en plein air un atelier de fortune, mais reste néanmoins un refuge où je peux donner libre cours à mes réflexions et laisser vagabonder mes ambitions ».

C’est un extrait d’une longue interview que nous a accordée M’hamed Elaadi, le 03 Mai 2011, alors qu’il avait la tête dans un trou noir. Heureusement pour lui comme pour nous,  beaucoup de choses ont changé depuis le temps… L’artiste n’a plus à s’inquiéter du sort du Théâtre d’El Jadida qui a repris ses belles allures et renoué avec ses services sous le nom du Théâtre Afifi, les activités culturelles ne sont plus au régime de l’indigence, El Jadida s’ébroue, s’étire, cherche à se réorienter, comme ces personnes qui viennent de percer une longue période de léthargie et qui ne demandent plus qu’à vivre pleinement et allégrement les nouveaux temps de leur résurrection.

Elaadi, lui aussi n’a pas abdiqué. Tout au contraire, son ascension dans le domaine de l’art de la sculpture est des plus honorables, puisqu’il ne cesse de représenter la touche locale dans différents symposiums à travers le monde.  Quelque chose a changé quelque part ? En tout cas nous estimons que  les honneurs et les reconnaissances les plus suaves sont celles qui émanent de notre proche entourage.